LUC MICHEL (ЛЮК МИШЕЛЬ) & EODE/
Luc MICHEL pour EODE/
Quotidien géopolitique – Geopolitical Daily/
2018 05 30/
Hier 29 mai, on se souvenait de la prise de Constantinople, la seconde Rome, par les turcs ottomans. C’était en 1453. Peu d’esprits ont célébré cet événements géopolitique pourtant capital : l’émergence de l ‘Empire ottoman comme grande puissance en Méditerranée, en Mer noire, dans les Balkans et en Europe même. Il faut donc souligner la remarquable tribune de Theodoros Koutroubas (Professeur des sciences politiques à l’UCLouvain) dans ‘La Libre Belgique’ (Bruxelles)
DES CONSEQUENCES GEOPOLITIQUES IMMENSES
Si Constantinople, l’ancienne Byzance grecque – seconde capitale de l’Empire romain, seconde Rome, qui avait maintenu un millénaire (1123 ans) le destin historique et civilisateur romain – avait depuis longtemps perdu grandeur et puissance (une longue agonie due aux Croisades occidentales et à l’hostilité du Papisme catholique envers l’Orthodoxie), l’événement aura des conséquences géopolitiques :
* La présence de l’Empire ottoman, comme puissance géopolitique en Europe, en Méditerranée et au Levant jusque 1917. Et la géopolitique ayant horreur du vide, Istanbul assumera en Orient le rôle géopolitique de Constantinople, succédant dans nombre de domaines au défunt Empire byzantin ;
* L’émergence de la Russie comme Empire, Moscou assumant la succession de Constantinople et de l’Orthodoxie (et ses aigles bizéphales) : c’est la naissance du mythe géoidéologique de la « Troisième Rome », qui est encore aujourd’hui au cœur du Néoeurasisme,
* Enfin une conséquence idéologique, l’opposition entre Europe catholique et Europe orthodoxe (Russie, mais aussi Roumanie, Moldavie, Serbie ou Bulgarie). Qui sera encore exploitée par les USA, après l’implosion de l’URSS, pour diviser les peuples de Yougoslavie pedant les « guerres de Yougoslavie ».
« DE L’ENNEMI COMMUNISTE A L’ENNEMI ORTHODOXE » (BRZEZINSKI)
Le professeur Koutroubas rappelle cette opposition entre les deux Europe : « Aujourd’hui, la littérature sur l’état romain chrétien en Orient attribue ses critiques négatives à la « tendance limitative de certains de définir le concept de l’Europe pour se référer essentiellement à l’Europe occidentale, vue comme ‘chrétienne’ et parfois même comme explicitement ‘catholique’. Ainsi, « selon plusieurs auteurs, d’Arnold Toynbee à Samuel Huntington, ‘l’Orthodoxie’ ou la ‘civilisation orthodoxe’, ont acquis une identité propre (…) non européenne et par conséquent non éclairée (…) L’auteur du « Choc des Civilisations » ne voyait-il pas la culture des peuples orthodoxes, comme étant inclinée vers l’autocratie, la plaçant aux côtés du « monde islamique », supposément enclin à un conflit avec l’Occident démocratique, ouvert d’esprit, catholique et protestant ». Nous faisons nous partie de ceux qui critiquent la Petite-Europe de Bruxelles comme « un club chrétien catholique » …
A Huntington, le professeur Koutroubas répond surtout qu’il n’est pas « possible de réduire une civilisation à sa seule composante religieuse, et encore moins la civilisation aujourd’hui appelée byzantine, qui constitue en fait le fruit d’un mariage heureux entre le polythéisme démocratique et philosophique grec, la culture du droit et de l’administration rationnelle romaine, le mysticisme et l’esprit de charité chrétien oriental et d’autres cultures des peuples avec lesquels l’Empire romain en orient a pendant longtemps coexisté ».
Quelle est le but de guerre des américains dans tout celà ? La liquidation de la Yougoslavie, c’est la continuation de la liquidation de l’Union Soviétique, obtenue par la victoire américaine à la fin de la guerre froide. Opération qui continue encore aujourd’hui, puisque le but c’est le démembrement de la Fédération de Russie. Et les américains sont directement derrière ces terroristes wahhabites, qui ensanglantent la Tchètchènie, le Daghestan et le Caucase russe. Et auxquels Poutine s’est opposé dès la fin des années ‘90. Dans les Balkans des Années 1991-2000, il s’agissait de liquider la Yougoslavie, de liquider un ensemble géopolitique qui était considéré par les américains comme Orthodoxe et lié à l’Orthodoxie russe.
Et on a vu d’ailleurs l’ennemi principal communiste devenir l’ennemi principal orthodoxe. C’était d’ailleurs l’avis de Zbignew Brzezinski, qui a dit au début des années 90 que « maintenant l’ennemi principal des USA, c’était l’Orthodoxie » ! La liquidation de la Yougoslavie faisait partie de ce plan qui est la liquidation de la Russie en tant qu’Etat continental, opposé à la domination mondiale de la thalassocratie américaine.
# RETOUR SUR L’EVENEMENT :
« IL Y A 565 ANS DISPARAISSAIT DEFINITIVEMENT L’EMPIRE ROMAIN EN ORIENT » (UNE OPINION DE THEODOROS KOUTROUBAS POUR ‘LA LIBRE BELGIQUE’)
Extraits :
« L’actualité politique de ce mois de mai, laissera sans doute passer inaperçue l’anniversaire d’un événement déjà très peu commémoré en Occident : la fin de l’Empire romain en Orient. Cet empire que d’aucuns appellent de nos jours « byzantin » s’acheva il y a 565 ans jour pour jour, le 29 mai 1453, lorsque Constantinople tomba aux mains des Ottomans à l’issue d’un long siège. Présenté comme un état théocratique et gouverné par des tyrans, « l’Empire des Grecs », n’a pas été regretté en Occident, jusqu’à ce que les historiens modernes révélèrent son apport décisif aux évolutions intellectuelles de la Renaissance (…) Ces stéréotypes ont la vie dure, et l’image de cet Etat, comme celle des pays considérés comme étant ses « héritiers spirituels » continuent d’en souffrir (…) Or, c’est à ceci que devrait servir les commémorations des évènements : remettre les pendules à l’heure de la réalité historique, ennemie naturelle de la propagande politique, et de ses pseudo-informations (infox ).
Celle de la fin de l’état romain chrétien pourrait nous (re)apprendre que le monde orthodoxe constituait une des rarissimes parties de la terre de son temps, où le peuple jouait un rôle assez important sur les affaires publiques. Sans être une démocratie dans le sens actuel du terme, l’Empire fut en fait jusqu’à sa fin un Etat de droit, soutenu par une bureaucratie professionnelle salariée où les citoyens étaient considérés comme étant égaux aux yeux de la Loi et où les titres de noblesse héréditaire n’ont jamais existé. Loin d’être un roi absolu et doté des pouvoirs thaumaturgiques, comme par exemple les souverains de France et d’Angleterre de l’époque, le « fidèle en Christ Dieu Roi et Empereur des Romains » (et non de Rome) ne devait pas sa légitimé qu’au seul sacre par l’Eglise. Comme aux temps des premiers empereurs romains, l’occupant du trône, homme ou femme, devait toujours maintenir la loyauté de l’armée, la confiance du sénat et l’acclamation des redoutables « démos « , les organisations du peuple, dans le grand hippodrome de la capitale (…)
Le Sénat, quant-à-lui, qui depuis l’antiquité comptait parmi ses membres que des familles patriciennes, fut ouvert par Constantin IX (Monomachos 1042-1055) aux hommes venant des classes moins prospères. Même si le vrai pouvoir de ce corps constitué a graduellement décliné durant la vie de l’Empire, le rôle qu’il continuait à jouer en tant que haut dicastère, contribuait, avec celui de la bureaucratie, dont les membres étaient majoritairement recrutés sur la seule base de leurs connaissances littéraires, à rendre la nature du régime roméo-byzantin beaucoup plus moderne et rationnelle que celle de plusieurs Etats de ce Nord de l’Europe aux cultures supposément plus adaptables à la démocratie que la « civilisation orthodoxe ».
La chute de Constantinople aux armées ottomanes a sonné la fin définitive de Rome en Orient et comme c’est toujours le cas dans l’histoire des civilisations, des éléments de la culture, de la politique, de la vie « byzantine », ont influencé les Etats et les civilisations qu’ils l’ont suivi, tandis que sa mémoire est devenue l’objet légitime de recherches historiques. Or les fanatismes de tout bord se nourrissent toujours des infox , et c’est pour ceci qu’il est peut-être utile de ne pas laisser passer cette date sans s’en souvenir. »
(sur La Libre Belgique du 29 mai 2019)
(Sources : PCN-Info – La Libre Belgique – EODE Think Tank)
LUC MICHEL (ЛЮК МИШЕЛЬ) & EODE
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