LUC MICHEL (ЛЮК МИШЕЛЬ) & EODE/
Luc MICHEL pour EODE/
Quotidien géopolitique – Geopolitical Daily/
2018 01 31/
Le cycle géopolitique précédent avait vu, depuis l’implosion de l’URSS, Moscou manifester une neutralité bienveillante vis-à-vis de Tel-Aviv. La victoire russe dans la guerre de Syrie aux côtés de l’Axe de la Résistance – Damas, Téhéran et le Hezbollah libanais – , l’alliance eurasiatique Moscou-Pékin qui s’oriente vers un Axe Moscou-Pékin-Téhéran, mais aussi l’alliance étroite entre les USA et Israël et l’hostilité des israéliens à la Syrie des Assad (1), ont changé tout cela.
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GRAND JEU AU PROCHE-ORIENT: POUTINE ‘NOUVEAU TSAR’ DE L’ORIENT (III). LA FIN DE LA NEUTRALITE BIENVEILLANTE AVEC ISRAEL
Malgré un forcing diplomatico-politique de Netanyahu, plein de maladresses (notamment des tentaives de pression vers Moscou, le fossé entre la Russie et Israël ne cesse de s’approfondir. Parmi ces maladresses, il y a la campagne des médias israéliens, alimentés par les officines de désinformation de Tsahal (comme ‘Debka’), pour tenter de persuader les russes de la « nocivité de l’alliance iranienne ». En vain, Téhéran étant un des pivot géopolitiques de l’expansion eurasiatique (1) …
SYRIE ET IRAN : LES ESPOIRS DECUS DE NETANYAHU
Le Premier ministre israélien a rencontré ce lundi 29 janvier le président russe Vladimir Poutine. Selon l’agence de presse ‘Fars News’, le bureau du Premier ministre israélien a annoncé que « cette rencontre a eu lieu au Musée juif de Moscou où les deux hommes ont eu un court entretien ».
Benjamin Netanyahu avait auparavant affirmé avoir l’intention de parler avec le président russe Vladimir Poutine sur « les activités de l’Iran dans la région ». Avant de prendre l’avion à destination de Moscou, Netanyahu avait prétendu, dans son style qui rappelle celui de Trump, que « l’Iran essayait d’affirmer sa présence en Syrie et d’y créer une base militaire ». Devant les journalistes, Netanyahu avait aussi prétendu qu’Israël préparait déjà des mesures en réaction à la conduite de l’Iran. Le Premier ministre israélien avait continué ses allégations sans fondement sur l’Iran, en disant que l’Iran « envisageait de transformer le Liban en une énorme base de missile » (sic). Netanyahu avait prétendu « qu’il parlerait aussi avec Poutine » de ce qu’il avait appelé « les efforts iraniens en vue de frapper Israël par des missiles à haute précision depuis le territoire libanais ».
Il avait ajouté maladroitement que « ses multiples visites en Russie s’effectuaient dans le cadre des coordinations militaires entre les armées israélienne et russe concernant la Syrie ».
Côté russe, le service de presse du Kremlin a annoncé que « Netanyahu et Poutine doivent s’entretenir des questions liées à l’augmentation des coopérations bilatérales économiques, commerciales et culturelles, ainsi que de la situation au Moyen-Orient et surtout en Syrie ».
Le journal israélien ‘Haaretz’ avait écrit auparavant que « Netanyahu avait aussi l’intention de parler avec Poutine du Plan global d’action conjoint (PGAC, accord sur le nucléaire iranien) et sur le délai établi par le président américain Donald Trump pour un changement de cet accord », ce que les Iraniens ont toujours catégoriquement rejeté.
Restait à voir si le Premier ministre israélien allait réussir à dissuader Moscou de son alliance avec l’Iran en ce qui concerne la crise syrienne ?
LE PARI PERDU DE NETANYAHU EN RUSSIE
À peine 48 heures après avoir rencontré le président russe, Vladimir Poutine, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu « semble ne pas se sentir satisfait, et ce, en dépit des apparences ».
L’Intéressé avait axé ses pourparlers avec le chef du Kremlin sur l’Iran et la Syrie. Lundi soir, au sortir de cette rencontre, Netanyahu avait tenté d’afficher sa satisfaction en affirmant que ses entretiens avec son hôte avaient été « bons » et « profonds », mais le « show » n’a convaincu personne : au lieu de rapporter les supposées réponses de Poutine à ses inquiétudes, comme il se devait de se faire, Netanyahu a repris ses allégations contre l’Iran, allant jusqu’à les assortir de « menace de guerre ». Signe que la colère l’a remporté sur tout autre sentiment.
En effet, dans ses rêves les plus fous, Netanyahu verrait désormais l’Iran « ériger un énorme site balistique dans le sud du Liban » (resic) en violation totale de la souveraineté libanaise, sur quoi il n’a cessé de mettre l’accent, puisqu’en Syrie, « les Iraniens craindraient les frappes israéliennes ». On se souvient de ce même Netanyahu qui accusait l’été dernier l’Iran de vouloir « construire une usine d’armement dans le Sud syrien » et de « nuire ainsi à la sécurité israélienne ». C’était l’époque où l’Iran, la Russie et la très opportuniste Turquie travaillaient ensemble à l’idée des « zones de désescalade en Syrie », époque où Israël a senti avoir perdu la guerre.
« Aujourd’hui encore, c’est Sochi et la perspective d’une fin de la guerre en Syrie qui met Tel-Aviv hors de lui et qui le pousse à délirer », dit avec raison la presse iranienne. Surtout que selon certaines sources, la clause 11 – que la Russie a tenu à inclure dans l’avant-texte de la déclaration finale des pourparlers – insiste sur le droit du peuple syrien de se faire restituer « le Golan » (annexé illégalement par Israël après la Guerre des Six jours) en « ayant recours à des mécanismes légaux reconnus par la charte de l’ONU et le droit international », et cela n’est pas du tout pour plaire aux Israéliens. « Dire que la guerre syrienne, Israël et ses alliés l’ont déclenchée pour que le Golan soit annexé à Israël et que cette perspective est plus que jamais inaccessible », commente ‘Fars News’ !
L’axe israélo-américain, aidé par ses alliés du golfe Persique (3), a d’ailleurs lancé une vague de pressions sans précédent pour que la Conférence de Sotchi soit une défaite. Le site ‘Debka’ (qui se voudrait un ‘Stratfor’ israélien, mais n’est qu ‘une officine de désinformation de Tsahal et du Mossad), proche des milieux du Renseignement de l’armée israélienne, parlait, juste avant la rencontre Netanyahu-Poutine, « des mesures prises par la Russie et destinées à mettre à la porte de la Syrie, le Hezbollah et l’Iran » (sic) et à faire d’Assad « un président de pacotille » (resic).
DES PROPOS INCENDIAIRES A LA REALITE GEOSTRATEGIQUE …
La déception est grande au sein du camp américain où en dépit de tous les actes de sabotage les pourparlers viennent de commencer à Sotchi. « Les Israéliens feraient donc mieux de revoir leur politique « syrienne » à défaut de quoi ils pourraient avoir à faire face à de plus graves problèmes » : il y a deux jours, la presse russe citait le président Assad qui dit « ne plus hésiter à prendre pour cible l’aéroport ‘Ben Gourion’ » en Israël, si « les chasseurs israéliens se payaient une nouvelle fois le luxe de bombarder le sol syrien ».
Les propos d’Assad ont été pris au sérieux puisque les voix s’élèvent au sein de l’armée israélienne pour dire à Netanyahu de mettre de l’eau dans son vin : « bombarder l’aéroport ‘Ben Gourion’ revient à déclarer la guerre à Israël. Il faut que nous gardions notre sang-froid », soulignent certains officiers de l’armée israélienne. Le Premier ministre vient de perdre à nouveau un pari, celui de pousser Poutine à changer de camp.
PREMIER SIGNAL FORT DE L’HOSTILITE RUSSE :
ABBAS SE RAPPROCHE DE MOSCOU ET LA RUSSIE S’INVITE DANS LA QUESTION ISRAELO-PALESTINIENNE
Ce 30 janvier, quelques heures après la rencontre entre Poutine et Netanyahu, Mikhaïl Bogdanov, vice-ministre russe des Affaires étrangères et Abdul Hafiz Noafel, ambassadeur de l’Autorité palestinienne se sont rencontrés à Moscou, et « ont insisté sur l’unité palestinienne ». Bogdanov a affirmé « avoir également parlé avec l’ambassadeur palestinien des relations russo-palestiniennes ». « Les solutions censées renforcer l’unité palestinienne ont également été évoquées », a souligné le vice-ministre russe.
Abdul Hafiz Noafel, a aussi déclaré, ce mardi, que « la visite du président, Mahmoud Abbas, à Moscou prévue en février, sera axée autour de la discussion des mécanismes proposés pour la gestion du dossier des négociations et la position internationale à l’égard du processus politique ». Dans une interview accordée à la radio officielle ‘La Voix de la Palestine’, Naofel a ajouté que « le rôle de la Russie dans le processus de négociation sera également discuté lors de cette visite ».
L’ambassadeur palestinien à Moscou a encore évoqué une réunion tenue ce lundi avec le représentant spécial du président de la Fédération de Russie pour le Proche Orient, Mikhaïl Bogdanov, pour préparer la visite du président de l’Autorité palestinienne. Le 19 janvier dernier, l’ambassadeur palestinien avait déclaré à ‘Anadolu’ qu’Abbas « effectuera une visite de deux jours à Moscou le 12 févrie »r, soulignant qu’il discutera avec les responsables russes de « l’accélération de la présentation d’une vision ou d’une nouvelle initiative pour la paix ». L’ambassadeur palestinien a affirmé que 3cette décision revêt une grande importance notamment après la décision américaine au sujet de Jérusalem », « et le retrait progressif des Etats-Unis du processus de paix ».
Le 6 décembre, le président américain Donald Trump avait annoncé la reconnaissance de Jérusalem-Est et Ouest comme capitale d’Israël et le transfert de l’ambassade des Etats-Unis de Tel-Aviv à la ville occupée (4). Les négociations de paix entre Israël et la Palestine sont bloquées depuis 2014 à cause du refus de Tel-Aviv de mettre fin à la colonisation et d’accepter les frontières d’avant 1967 comme base à la Solution à deux Etats.
SECOND SIGNAL FORT DE L’HOSTILITE RUSSE :
« MOSCOU BARRICADE LE CIEL SYRIEN »
« Moscou barricade le ciel syrien » titre ce mercredi ‘Prerss TV’ !
«Les drones permettent aux forces russes de maîtriser tout le territoire syrien», a en effet annoncé ce 30 janvier le ministre russe de la Défense.
Lors d’une Conférence « sur la performance des forces russes en Syrie », le ministre russe de la Défense a fait état du « déploiement de près de 70 drones russes dans le ciel syrien par jour ».
Sergueï Choïgou a évoqué « le rôle décisif des forces navales russes dans les opérations de ce pays en Syrie » avant de souligner : « Jusqu’à présent la flotte maritime russe a effectué 171 opérations et les navires et sous-marins ont lancé plus de 100 missiles de croisière Kalibr contre les fiefs des terroristes en Syrie. » Il a également ajouté que le porte-avions Amiral-Kouznetsov, qui portait les avions russes lors des opérations des forces de ce pays en Syrie, a réussi « à détruire 1.252 bases des terroristes ».
La flotte maritime russe, qui comporte près de dix navires et sous-marins, est active dans la mer Méditerranée. Précisément sur une diagonale géostratégique Sébastpol (Crimée) – Tartous (Syrie), qui conditionne la présence russe en Méditerranée. Un Axe pour laquelle Moscou lutte depuis Catherine la Grande ! Et qui explique pourquoi les dossiers de Crimée et de Syrie sont des questions géopolitiquement essentielles à la puissance russe …
Depuis 2015, la Russie mène des opérations anti-terroristes en Syrie et elle a infligé de lourdes défaites aux terroristes. Vladimir Poutine a annoncé, le mois dernier, le retrait d’une partie significative des forces russes en Syrie, quelques jours après l’annonce par Moscou de la « libération totale » du pays de l’emprise des terroristes. Et pourtant, elle continue à combattre les résidus de Daech. Il y a deux jours, les avions russes ont frappé une zone à Alep contre laquelle l’armée turque comptait lancer une offensive dans le cadre de son opération « Rameau d’olivier ».
Présence stratégique essentielle de la base navale russe en Syrie et alliance géopolitique, elle aussi essentielle, avec Téhéran en Caspienne et en Eurasie, voici pourquoi Israël pèse peu dans l’équation orientale de Moscou …
NOTES :
(1) Voir sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
SYRIE D’UNE GUERRE A L’AUTRE (V): ISRAEL GRAND PERDANT DE LA GUERRE QUI SE TERMINE EN SYRIE
(2) Voir sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
LA MER CASPIENNE : PIVOT STRATEGIQUE DE L’INTEGRATION EURASIATIQUE VERS L’IRAN
(3) Voir sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
AXE WASHINGTON – TEL-AVIV – RYAD : ‘TRUMP S’ALIGNE SUR LE SCENARIO DE NETANYAHU’ CONTRE L’IRAN
(4) Voir sur LUC MICHEL’S GEOPOLITICAL DAILY/
RECONNAISSANCE DE JERUSALEM COMME CAPITALE D’ISRAEL: TRUMP LACHE SA BOMBE GEOPOLITIQUE SUR LE PROCHE-ORIENT !
(Source : Fars Today – Press TV – Presse russe – Debka – Times of Israel – EODE Think-Tank)
Photo :
Poutine et Netanyahu au Musée juif de Moscou, Poutine et Abbas, leader de l’Autorité palestinienne, lors d’une précédente visite à Moscou.
LUC MICHEL (ЛЮК МИШЕЛЬ) & EODE
* Avec le Géopoliticien de l’Axe Eurasie-Afrique :
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