2023 01 07/
200.000 tirailleurs dits “sénégalais” (en fait venus de toute l’Afrique) ont combattu aux côtés des poilus pendant la Grande Guerre :
À l’occasion de la sortie du film « Tirailleurs », avec Omar Sy, mercredi, le gouvernement français a annoncé que les derniers tirailleurs sénégalais pourront retourner dans leur pays d’origine, sans perdre le bénéfice de la pension du minimum vieillesse.
PLUS DE 100 000 D’ENTRE EUX ONT PARTICIPE AUX COMBATS DE LA SECONDE GUERRE MONDIALE.
Mais étrangement, l’histoire française les a rendus invisibles. Pourtant, de nombreux « tirailleurs sénégalais » sont morts au front. Même face à l’ennemi, le sort de ces soldats noirs était différent de celui des Blancs. Ces derniers sont capturés et envoyés en Allemagne, tandis que certains des premiers sont massacrés, d’autres sont faits prisonniers dans des camps en France.
En décembre 1944, au Sénégal, des tirailleurs rentrant chez eux ont été massacrés dans le camp militaire de Thiaroye, où ils manifestaient pour réclamer le paiement de la solde qui leur était due pendant leurs années de captivité. Les troupes coloniales et les gendarmes français sont accusés d’avoir causé des dizaines de morts. Les historiens évoquent même des centaines de victimes.
Ces récits reflètent la grande histoire des tirailleurs sénégalais, pendant la Seconde mais aussi la Première Guerre mondiale. Car au moment de la Libération de la France en 1945, ces soldats ont été mis de côté, comme s’ils n’avaient pas participé à la victoire française. Cela était dû, notamment, à la volonté des États-Unis qui, en pleine période ségrégationniste, ont participé à la Libération et ont refusé de défiler aux côtés des soldats noirs.
HUIT DECENNIES PLUS TARD, UN NOUVEAU FILM MET EN LUMIERE CES SOLDATS DE L’OMBRE.
Dans « Tirailleurs », Omar Sy et les autres acteurs revisitent l’histoire des Tirailleurs sénégalais pendant la Première Guerre mondiale. Un corps de soldats qui faisait partie des troupes coloniales de la fin des années 1800. Une unité qui comprenait, comme son nom l’indique, des Sénégalais mais aussi d’autres Africains.
Pendant la Première Guerre mondiale, près de 200 000 tirailleurs ont défendu les couleurs de la France, dont les trois quarts sur le continent européen. On estime à 30 000 le nombre de soldats perdus dans cette unité. Sans compter les soldats qui sont revenus blessés.
Le film de Mathieu Vadepied, coproduit par Omar Sy, est un hommage à ces tirailleurs sénégalais. La sortie du film – et surtout la promotion qui l’a entouré – a conduit le ministère français de la Solidarité à annoncer une mesure concernant les derniers tirailleurs sénégalais. Ils pourront retourner dans leur pays d’origine tout en continuant à bénéficier de la pension minimale de vieillesse. Une mesure symbolique : selon les caisses d’allocations familiales françaises, 22 d’entre eux sont encore concernés.
UNE RECONNAISSANCE TARDIVE POUR EUX.
Surtout quand on sait les sacrifices qu’ils ont consentis. Comme le 16 avril 1917. Dans le secteur du Chemin des Dames, à Hurtebise, Laffaux et Vauxaillon, la bataille fait rage. Les tirailleurs sénégalais, forts d’environ 15 000 hommes, composant la première ligne de combattants. La moitié d’entre eux trouvera la mort. Le député du Sénégal Blaise Diagne, à l’Assemblée nationale, avait accusé les généraux français d’avoir utilisé les tirailleurs comme de « la chair à canon ».
POURTANT, BEAUCOUP DE POLEMIQUE TOURNE AUTOUR DE CE FILM ET DE SES ACTEURS.
Quatre jeunes hommes originaires d’Afrique, arrivés en France il y a plusieurs années, seraient sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). En 2021, ils avaient participé dans les Ardennes au tournage du film « Tirailleurs » aux côtés de l’acteur français.
Leur visage s’affiche dans toutes les salles de cinéma de France, mais ils pourraient être bientôt expulsés du pays. Selon l’antenne locale du collectif Réseau éducation sans frontières (RESF) des Ardennes, quatre jeunes qui ont participé au tournage du film « Tirailleurs » avec Omar Sy, en 2021, après avoir été choisis lors d’un casting, sont désormais sous le coup d’une Obligation de quitter le territoire français (OQTF).
Certains figurants ont ainsi été reçu. « Tragique ironie de l’histoire, et de l’Histoire : ceux, qui par leur participation au film avaient permis de rappeler l’ingratitude de la République française vis-à-vis de ceux qui ont dû combattre pour elle, sont aujourd’hui les victimes de ce qu’on peut considérer comme une autre forme d’ingratitude », dénonce RESF dans un communiqué signé du collectif ardennais pour la défense des jeunes majeurs étrangers.
Pour RESF, « ils se sont pliés à tout ce qui était nécessaire à leur intégration dans la société (dont la maîtrise du français) et à leur contribution à l’économie française, en réussissant leur parcours de formation ». C’est notamment pourquoi ils auraient fait appel de la décision des services de l’État.
« Malgré cela, les services de la préfecture des Ardennes ont considéré que ces jeunes n’avaient pas légitimité à rester en France et ont délivré ces OQTF, privant des entreprises de leur main-d’œuvre, dans un département démographiquement affaibli », écrit le communiqué. « D’autant plus qu’ils viennent de la même région d’Afrique que les tirailleurs et la famille d’Omar Sy », ajoute cette membre de RESF Ardennes.
QUANT A OMAR SY, LE HEROS DU FILM, S’ETONNE QUE LES FRANÇAIS SE SENTENT PLUS TOUCHES PAR LA GUERRE EN UKRAINE QUE PAR D’AUTRES CONFLITS PLUS LOINTAINS.
Heureux que le film ‘Tirailleurs’ « apaise » et aille « vers la réconciliation », l’acteur qui vit aujourd’hui aux États-Unis estime qu’aujourd’hui, les choses bougent enfin. « Ces récits-là vont sortir de sous le tapis ». « Il faut accepter le récit des autres. Un récit ne contredit pas l’autre, ne l’annule pas, ne le nie pas. C’est l’addition de tous ces récits qui fait notre histoire commune ».
On estime que les 180.000 tirailleurs sénégalais engagés dans la guerre de 14-18, 30.000 ont été tués.
Interrogé sur une guerre plus proche, celle de l’Ukraine, Omar Sy s’étonne que les gens se sentent plus touchés par ce conflit que par ceux qui se déroulent en Afrique. « Je suis surpris que les gens soient si atteints. Ça veut dire que quand c’est en Afrique vous êtes moins atteints ? » « Moi, je me sens menacé de la même manière quand c’est en Iran, ou en Ukraine », assure-t-il. « Une guerre, c’est l’humanité qui sombre, même quand c’est à l’autre bout du monde », souligne-t-il.
« Quand c’est loin, on se dit que ‘là-bas, ce sont des sauvages, nous, on ne fait plus ça’. Comme le Covid, au début, on a dit : ‘c’est que les Chinois' ». « On se rappelle que l’homme est capable d’envahir, d’attaquer des civils, des enfants. On a l’impression qu’il faut attendre l’Ukraine pour s’en rendre compte », ajoute-t-il.
Des propos qui ont versé beaucoup d’encre au pays des défenseurs des droits de l’Homme. Pourtant, les paroles de cet acteur reflètent un côté humaniste, les médias français s’acharnent encore une fois sur une personnalité pour masquer ses propos, qui ne sont pourtant pas loin d’une réalité. Est-ce réellement les propos de l’acteur qui dérange ou est-ce la sortie de ce film, en pleine période où la France perd du terrain en Afrique face aux Africains, qui dérange ?
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